Une voie intérieure

Nous disons bien une voie intérieure, car pour Jung, elle ne s’administre pas de l’extérieur comme un traitement, une technique, mais sa source provient de l’intérieur : c’est le grand œuvre du Soi. Ainsi, la psychanalyse symbolique est-elle déclarée symbolique parce qu’elle est la psychanalyse qui, pour chacun s’exerce et se déroule de l’intérieur, orchestrée par le Soi au travers des symboles des rêves.
Les rêves, nos rêves, lorsque nous les accueillons en contemplation systématique et rigoureuse de séance en séance et que nous respectons leur matériau objectif, nous psychanalysent eux-mêmes, nous travaillent, nous pensent, en nous confrontant à ce qui nous mystifie et nous sépare de l’unité harmonieuse de notre être. Tout en même temps, ils nous accompagnent fidèlement et patiemment dans la recherche de l’harmonisation. Certes, tout le monde ne se souvient pas de ses rêves. Mais le Soi se manifeste à chacun au moins sous la forme de la dimension symbolique de l’existence, que Jung reconnaît notamment dans les phénomènes de synchronicité. Lorsque le sujet n’a pas pu recueillir de rêves, il lui est néanmoins ainsi possible de contacter le Soi en contemplant le matériau symbolique objectif des synchronicités qu’il expérimente dans sa vie quotidienne.
Ainsi, une femme arrivant à sa première séance d’analyse n’avait pas de rêve à proposer. L’analyste lui suggéra de raconter un évènement récent de sa vie qui soit «comme un rêve».

C’est ce qui s’était passé juste avant d’arriver à cette séance qui lui vint immédiatement à l’esprit : elle désirait retirer sa voiture du parking pour se rendre à ce premier rendez-vous, mais elle en fut empêchée par le stationnement irrégulier d’une autre voiture qui s’avéra être le véhicule d’un homme vulgaire, très agressif, et de mauvaise foi.
L’analyste proposa à sa nouvelle cliente de considérer symboliquement cette mésaventure comme une synchronicité exprimant à l’extérieur une situation psychique intérieure, comme Jung nous apprend à le faire. Il lui suggéra comme une hypothèse à vérifier que l’homme malotru pouvait représenter une figure de masculin (animus) négatif marqué par la colère, l’agressivité, qui, dans son inconscient, jouerait comme un obstacle à sa recherche de l’ouverture et de l’épanouissement. Toute sa première séance fut ainsi consacrée à la contemplation des figures masculines de colère qui s’exprimaient en elle, liées à l’histoire de sa famille. Ce thème lui parla beaucoup et ouvrit une problématique d’évolution très pertinente pour sa vie. Après cette première séance, elle ne manqua plus de rêves pour la suite de son analyse.

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